Pour un vampire, Haru a une vie plutôt normale. Il sait où aller pour se nourrir, sait comment contrôler la Bête en lui. Pour un Malkavian aussi jeune, c’est surprenant qu’il soit aussi à son affaire. Il faut admettre que le stéréotype le plus commun de son clan est qu’ils sont tous des fêlés; des vampires imprévisibles qui sont impossibles à contrôler. Mais depuis sa transformation, le jeune homme fait de son mieux pour prouver que c’est totalement faux. L’habit ne fait pas le moine, et le clan ne fait pas le vampire. Il fait de son mieux pour vivre une vie la plus normale possible— il va toujours à l’école, fait du mieux qu’il peut pour avoir une vie sociale normale… Enfin, la plus normale possible. C’est évident qu’il y a bien des moments où la Bête aimerait prendre le dessus, mais pour un jeune vampire, il se débrouille plutôt bien. C’est surtout qu’il ne voudrait pas perdre le contrôle pendant qu’Irene est là.

Il soupire avec un sourire en pensant à son amie. C’est sa plus vieille amie, après tout. Irene a toujours été là pour lui, dans les moments bons comme dans les mauvais. C’est probablement la personne qui se rapproche le plus de son âme sœur… Tant qu’il ne l’a pas trouvée. Haru est assis à la table de la cuisine, le menton dans le creux de la main alors qu’il relit les notes de son dernier cours. Sa motivation reste toujours de devenir professeur à la maternelle. Son cœur éternellement jeune est quelque chose qui lui donne un avantage— il adore les enfants. Certes, il y a toujours une peur de faire quelque chose qui leur ferait du mal… Mais Haru est quelqu’un d’acharné, et rien ni personne ne peut l’empêcher d’accomplir ce rêve.

Il sursaute avec un juron lorsqu’il entend la porte de son appartement s’ouvrir; il n’attendait personne. Mais lorsqu’il se retourne en entendant la voix d’Irene, il lâche un soupir. Comme il est heureux de la revoir. Il a l’impression que ça fait des semaines qu’il n’a pas vu ce sourire… Ils sont tous les deux occupés, et donc, ils se voient moins souvent depuis qu’ils sont installés à Londres. « Tu ne peux pas me faire une frousse comme ça! » Haru s’exclame avec un rire, secouant la tête tout en s’approchant de son amie. Il l’enlace, la serrant contre lui. En se reculant, il la regarde et remarque le sac qu’elle a emmené avec elle. « Soirée pyjama? » Il hausse un sourcil, un petit sourire aux lèvres. « Je dois avoir un restant de pop-corn à quelque part… » Bien entendu, il ne garde de la nourriture dans ses armoires que pour elle.

Haru hoche la tête à son commentaire. Quelqu’un d’autre aurait pu mal le prendre, mais c’était vrai qu’Haru n’était jamais trop occupé pour elle. Il avait peine à se rappeler le nombre de fois qu’il avait tout laissé tomber pour accourir à ses côtés. Irene était comme le soleil de la vie du jeune vampire; sans elle, il ne s’en serait jamais sorti. « Tu me connais bien, » dit-il, la regardant faire comme chez elle alors qu’elle se servait directement dans le frigo. Comme l’espace est à aire ouverte, Haru se dirige vers le salon pour parcourir la collection de films qu’il possède. « Libre, hm? » Il hausse un sourcil, ses yeux foncés cherchant quelques suggestions qui pourraient aider son amie à décrocher un peu. Il pouvait imaginer qu’elle voulait mettre son cerveau à off pour une soirée, afin de penser à autre chose que son travail. « J’avoue que je pourrais profiter d’une soirée de congé, » admet-il, tendant le bras pour sortir de l’étagère deux enveloppes de films. « J’ai le cerveau qui commence à faire de la bouillie. » Il rit légèrement, tendant les deux films— Finding Nemo et The Lion King, avant de les mettre sur la table à café. « T’as le choix, » Haru dit en se laissant tomber aux côtés d’Irene.

À la question de son amie, Haru reste silencieux pendant un long moment. Le ton qu’elle avait employé ne cachait pas ses véritables intentions— il était conscient qu’elle parlait de ce qu’il était : un vampire. Même si ce n’était pas un secret entre eux (après tout, elle était là quand c’était arrivé), Haru se sentait toujours un peu mal à l’aise quand le sujet était mentionné. « Ça va. » Il répond avec une petite voix, évitant Irene du regard. Elle n’avait pas changé avec lui, parce qu’il s’était promis de ne jamais lui faire de mal. Mais il y avait cette petite voix dans sa tête qui lui chuchotait à l’oreille, parfois. Comme elle sentait bon, comme son sang devait être délicieux. Mais Irene était sa meilleure amie, et s’il advenait qu’il lui fasse du mal… Haru ne se le pardonnerait jamais. Plutôt mourir! « Je gère quand même bien, » fini-t-il par rajouter, pour qu’elle ne s’inquiète pas. Un nouveau silence étrange plane entre les deux amis avant qu’Haru finisse par le briser d’un rire. « Wow, je ne me suis jamais senti aussi mal à l’aise. À part peut-être la fois ou j’ai dit à mes parents que j’étais gay. »

Il repense à ses parents, et soudainement, il se sent triste. Même s’il leur parle encore, c’est un peu plus compliqué, maintenant. Comment est-ce qu’on explique à ses parents qu’on ne peut pas leur rendre visite pour le Nouvel An lunaire? Il mord l’intérieur de sa joue, voulait oublier ce petit moment de tristesse. Il ne voulait pas que ça empire. Il savait que s’il se laissait trop aller avec ses émotions négatives, c’était à ce moment là qu’il se sentait le plus vulnérable. Devenir un vampire l’avait changé, mais il ne voulait pas qu’Irene voit ces changements. Se redressant sur le sofa, il tourne la tête vers elle. « Alors? Quel film on regarde? »